Une campagne orchestrée d'incitation à la haine en Iran

En Iran, une campagne de désinformation et d’incitation à la haine est orchestrée par le gouvernement contre la communauté bahá’íe.
La vague montante de violence qui en résulte contre les bahá’ís d’Iran, et le degré avec lequel les assaillants, qu’ils soient ou non officiellement à la solde du gouvernement, ont pu agir avec une totale impunité, est alarmante.
Mérite la confiance de ton voisin, et ne lui montre qu’un visage amical et souriant. […]
Sois équitable en ton jugement et réservé dans tes paroles. Ne sois injuste envers personne, et montre à tous une douceur parfaite.
– Bahá’u’lláh
Tablette du juste
Une incitation à la haine de plus en plus fréquente sur les média sociaux
L’intensité de la campagne d’incitation à la haine contre les bahá’ís, orchestrée en Iran par l’État, a augmenté de manière significative au cours des derniers mois.
Cette évolution est particulièrement préoccupante car l’histoire montre que les crimes les plus odieux peuvent être perpétrés dans un tel climat de propagande, de désinformation et de haine.
La foi bahá’íe est attaquée systématiquement à partir de centaines de sites Web et de dizaines de comptes de médias sociaux. Depuis 2017, plus de 33 000 éléments de contenu ont été publiés ou diffusés contre les bahá’ís.
Au cours des quatre premiers mois de 2021, la publication de contenus haineux a augmenté de 44 % par rapport à la même période de l’année précédente.
Quarante années de propagande
Le gouvernement iranien poursuit depuis de nombreuses années, dans les medias officiels, une campagne d’incitation à la haine contre les bahá’ís, en les décrivant comme des agents d’Israël, des adeptes immoraux de Satan, ou des ennemis de l’État et de l’Islam.
Le rapport Incitation à la haine publié par la Communauté internationale bahá’íe, avait démontré en 2011, sur un échantillon de milliers de documents de propagande, comment les croyances bahá’íes sont déformées de manière à offenser au maximum la population musulmane d’Iran.
Cette propagande enflamme les préjugés et la discrimination contre les bahá’ís dans certaines couches de la population. Les statistiques sont alarmantes quant aux effets obtenus : des agressions physiques publiques, des incendies criminels de domiciles et des profanations de tombes, et un climat d’insulte et de harcèlement dans les espaces scolaires.
L’orchestration de cette intolérance religieuse et de cette haine débridée vise à classer ces violences, en façade, comme des actes isolés commis par des citoyens ordinaires. En réalité, nombre d’incidents, sinon la majorité, portent la marque d’une approbation, d’un encouragement ou d’une implication directe des agents gouvernementaux et il ne peut y avoir guère de doute quant au rôle d’une propagande officielle.
Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel l’Iran est partie, dispose que « Tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence est interdit par la loi ». Mais le rapport La violence en toute impunité de la Communauté internationale bahá’íe indiquait dès 2013 comment le gouvernement iranien a adopté comme politique officielle de ne pas poursuivre ni sanctionner ceux qui portent atteinte aux bahá’ís ou à leurs biens. De nombreuses notes de service confidentielles ont fait surface qui incitent les autorités locales à diverses formes de discrimination contre les bahá’ís, telles que la suppression de leur liberté économique ou la restriction de leurs opportunités d’études supérieures.
Par ailleurs, les témoignages de tortures carcérales et autres coercitions physiques contre les bahá’ís arrêtés et interrogés voient leur nombre évoluer avec ce même sentiment d’impunité au sein des forces de l’ordre.
Le rapport La question bahá’íe revisitée : persécution et résilience en Iran, de 2017, montre comment les bahá’ís se trouvent au quotidien dans une situation intenable. Ils doivent réclamer la justice et la protection auprès des mêmes autorités qui incitent de façon systématique à la haine à leur égard et auprès d’un système judiciaire élaboré autour de lois qui codifient des préjugés à leur endroit.
En particulier, les bahá’ís d’Iran ne disposent d’aucun moyen pour répondre à ces campagnes de désinformation.
Les bahá’ís en Iran ne sont en rien une menace pour le gouvernement. Les bahá’ís iraniens ne sont alignés avec aucun autre gouvernement, idéologie ou mouvement d’opposition. Les principes de leur foi exigent des bahá’ís une obéissance à leur gouvernement, l’abstention de toute implication dans la politique partisane, dans toute activité subversive ou quelconque forme de violence.
Les bahá’ís iraniens ne demandent aucun privilège, seulement une protection sous la Charte internationale des droits de l’Homme, une déclaration à laquelle l’Iran a souscrit. Ils demandent en particulier le droit de vivre, de déclarer et de pratiquer leur religion, le droit à la liberté et à la sécurité des personnes et le droit à l’éducation et au travail. Malgré les épreuves qu’ils subissent, les bahá’ís iraniens continuent avec authenticité à aimer leur pays et ne demandent qu’à être autorisés à contribuer à l’amélioration de la société iranienne.
Une déformation grossière de la réalité qui se veut efficace
Au cours de la décennie passée, de nombreux Iraniens, conscients des origines de cette propagande haineuse et injuste contre les bahá’ís et témoins des actions pacifiques et des contributions constructives que les bahá’ís iraniens offrent à la société, se sont mobilisés pour leur défense.
Si une partie de la population iranienne résiste aux effets de cette incitation à la haine, les moyens alloués à cette campagne étatique sont en constante hausse.
L’ampleur de cette propagande anti-bahá’íe est mieux illustrée par la présentation d’exemples. Un échantillon des différents types de propagande anti-bahá’íe a été rassemblé et mis à disposition, selon différentes catégories, sur le site des archives de la persécution des bahá’ís en Iran.
L’exemple du sanctuaire de Baháʼu’lláh
Baháʼu’lláh, le prophète fondateur de la foi bahá’íe, a passé les dernières années de sa vie d’exil au manoir de Bahjí, situé entre Saint Jean d’Acre et Haïfa.
Il est enterré dans une petite maison à côté du manoir, entourée de jardins.
Ce site, le point de dévotion pour les prières de ses adeptes, a été reconnu en 2008 par l’UNESCO comme un site du patrimoine mondial, possédant une « valeur universelle exceptionnelle ».
Une image de ce lieu a été déformée et montre un adorateur s’inclinant devant des pierres tombales en flammes. Le fonds de ce montage grossier représente l’entrée du sanctuaire de Bahá’u’lláh.
La présentation des bahá’ís comme des adeptes sataniques ou des apostats aux croyances immorales et perverses est l’une des méthodes utilisées pour soulever la population iranienne.
La perversion de faits historiques
La foi bahá’íe est connue dans le monde entier comme une religion mondiale indépendante. Son calendrier débute en 1844. Bien des revers de l’histoire se sont écrits entre le 19e siècle et aujourd’hui.
Exilé de sa terre natale par les autorités de Téhéran, Bahá’u’lláh a connu plusieurs décennies d’emprisonnement, à Bagdad et Constantinople (Istanbul) puis à Andrinople (Edirne) et enfin à ‘Akká.
Durant les années de famine de 1914 à 1918, l’action de son fils ‘Abdu’l-Bahá a permis de soulager la détresse des habitants de la région de Haïfa et ‘Akká. Son action humanitaire a été reconnue en 1920 par les autorités britanniques, qui l’ont fait Chevalier de l’ordre de l’Empire britannique.

Les anachronismes ne manquent pas dans les campagnes de désinformation contre les bahá’ís d’Iran. Les autorités cherchent à capitaliser sur les sensibilités géopolitiques de la région en propageant l’idée que les bahá’ís sont des espions britanniques ou israéliens. Cet argument percutant est mobilisé pour générer la méfiance et la haine à leur égard et instiller l’idée que les bahá’ís sont des étrangers dans leur propre pays, qui s’adonnent à des activités de « propagande contre le régime » et méritent pour cela d’être châtiés.