Appels à l’action alors que les responsables bahá’ís iraniens débutent leur troisième année en prison

Partager cet article :

699_00.jpg New York, publié le 10 mai 2010 – Alors que les sept responsables bahá’ís iraniens s’apprêtent à entamer leur troisième année d’emprisonnement, de nouveaux détails relatifs aux difficiles conditions de leur incarcération se sont fait jour, provoquant de nouveaux appels pour leur libération immédiate.

Les prisonniers sont Mme Fariba Kamalabadi, MM. Jamaloddin Khanjani, Afif Naeimi, Saeid Rezaie, Mme Mahvash Sabet, MM. Behrouz Tavakkoli et Vahid Tizfahm.

« Ces bahá’ís innocents ont été emprisonnés pendant deux années entières dans la tristement célèbre prison d’Evin à Téhéran dans des conditions en parfaite violation des standards internationaux », déclare Bani Dugal, la principale représentante de la Communauté internationale bahá’ís auprès des Nations unies.

« Nous appelons les autorités iraniennes à les libérer maintenant et demandons à la communauté internationale de nous rejoindre dans cet appel. Les exigences de la justice ne requièrent rien de moins. »

Les prisonniers, anciens membres d’un groupe informel connu sous le nom de Yaran ou « Amis », veillaient aux besoins sociaux et spirituels de plusieurs centaines de milliers de bahá’ís en Iran. Ils ont été détenus dans la prison d’Evin depuis leur arrestation en 2008, six d’entre eux le 14 mai et l’une d’entre eux deux mois plus tôt.

Aucune audience n’a eu lieu jusqu’au 12 janvier dernier, lorsqu’ils ont comparu devant la 28ème section du Tribunal révolutionnaire. Les accusations, qui comprennent l’espionnage, des activités de propagande et la « corruption sur Terre », ont été démenties. D’autres comparutions ont eu lieu les 7 février et 12 avril.

« Au cours des trois audiences tenues jusqu’à ce jour, aucune preuve n’a été avancée d’un quelconque comportement répréhensible, rendant évident le fait que les prisonniers sont détenus exclusivement en raison de leurs croyances religieuses », a déclaré Mme Dugal.

« Si leur liberté ne leur est pas immédiatement accordée, ils devraient à tout le moins être libérés sous caution. Des mesures devraient être prises pour assurer que le procès soit conduit dans des conditions équitables conformément aux standards internationaux », a-t-elle ajouté.

Des conditions de détention sévères

Vendredi prochain marque le second anniversaire de l’emprisonnement du groupe. De plus en plus de détails relatifs aux dures conditions dans lesquelles ils sont détenus se sont fait jour. Ainsi, l’on sait désormais que les deux femmes et cinq hommes sont confinés dans deux cellules tellement petites, empêchant les mouvements et le repos nécessaire.

« Ils n’ont ni lit ni couchage », a précisé Mme Dugal.

L’atmosphère de la prison est rance et les prisonniers n’ont accès à de l’air frais que deux heures chaque semaine. Si la lumière dont ils disposent est éteinte en plein jour, les cellules sont plongées dans un noir total rendant impossible de voir quoi que ce soit.

« Les contacts avec leurs proches sont limités à une conversation téléphonique de 10 minutes par semaine ou des visites généralement conduites derrière une vitre », a ajouté Mme Dugal.

« De telles conditions inhumaines montrent l’absence de toute considération pour les principes posés dans les accords internationaux relatifs au traitement des prisonniers selon lesquels personne ne doit être soumis à la torture ou à des traitements ou punitions cruels, inhumains ou dégradants. »

« Aucune suite n’a été donnée aux requêtes des prisonniers demandant de modestes améliorations de leurs conditions, entraînant des conséquences pour leur santé. »

« Ces personnes sont innocentes et il n’existe aucune raison justifiant qu’il leur soit infligé de telles souffrances. »

Selon la journaliste Roxana Saberi – qui a pendant trois semaines partagé une petite cellule avec les deux prisonnières bahá’íes : « Elles enroulent une couverture pour l’utiliser comme un oreiller. Le sol est en ciment couvert seulement d’un mince tapis brun causant fréquemment aux prisonnières des maux de dos et des contusions durant leur sommeil (…) Lorsque j’étais avec elles, nous étions autorisées à nous rendre dans une cour emmurée quatre jours par semaine pour 20 ou 30 minutes. »

Voir ci-dessous la section « Aperçu de la prison d’Evin »

Action internationale

La Maison universelle de justice, l’instance suprême de la communauté bahá’ís, a appelé la communauté internationale bahá’íe à organiser ce vendredi des réunions de prières dédiées à travers le monde entier pour se souvenir des bahá’ís d’Iran et de l’ensemble de leurs compatriotes opprimés de manière similaire.

« Nos cœurs sont attristés d’assister au passage d’une année de plus durant laquelle les sept anciens membres des Yaran demeurent emprisonnés pour des accusations infondées pour lesquelles les autorités n’ont pas la moindre preuve », écrit la Maison universelle de justice.

Ce second anniversaire, continue-t-elle, rappelle les « multiples formes d’oppression » auxquelles fait face la communauté bahá’íe d’Iran, incluant « interrogatoires, arrestations sommaires et emprisonnement, privation des moyens de subsistance, destruction délibérée de propriétés et déni d’accès à l’éducation pour les étudiants bahá’ís ».

Le réseau de défenseurs de droits humains United4Iran appelle également à un geste de solidarité collective avec les responsables bahá’ís. Les sympathisants du réseau à travers le monde sont invités à reproduire les dimensions des cellules de la prison d’Evin afin de faire prendre conscience du confinement vécu dans un si petit espace. Les photos et les clips vidéos seront partagés par le biais d’Internet pour attirer l’attention de la communauté internationale sur la détention arbitraire continue endurée par les sept responsables bahá’ís.

Aperçu interne de la prison d’Evin

Durant sa présence dans la prison d’Evin en Iran, la journaliste Roxana Saberi a rencontré un certain nombre de prisonnières qui lui ont donné force et inspiration alors qu’elle faisait elle-même face aux interrogatoires de ses gardiens et aux difficiles conditions carcérales.

Parmi ces prisonnières se trouvaient les deux responsables bahá’íes, Fariba Kamalabadi et Mahvash Sabet, avec qui Mlle Saberi a partagé une cellule pendant près de trois semaines début 2009.

« Fariba et Mahvash sont les deux prisonnières que j’ai rencontrées à Evin qui m’ont le plus inspirée, a indiqué Mlle Saberi dans une interview récente. Elles m’ont montré ce que signifie le fait d’être désintéressée et de se préoccuper plus de la communauté et de ses convictions que de soi-même. »

La description de Mlle Saberi des conditions de détention imposées aux deux femmes bahá’íes offre un large aperçu de ce qu’est le fait d’être injustement incarcéré en Iran aujourd’hui, une situation qui ne concerne pas uniquement les bahá’ís, mais des centaines si ce n’est des milliers de journalistes, de militants des droits des femmes ou des droits de l’homme actuellement détenus en Iran.

Selon Mlle Saberi, les deux prisonnières bahá’íes sont confinées dans une petite cellule avec deux petites fenêtres recouvertes de métal et dépourvue de lits.

« Elles doivent dormir sur des couvertures. Elles n’ont pas d’oreiller non plus. Elles enroulent une couverture pour l’utiliser comme un oreiller. Elles utilisent leurs tchadors comme drap. »

« Le sol est en ciment couvert seulement d’un mince tapis brun, causant fréquemment aux prisonniers des maux de dos et des et des contusions durant le sommeil. »

« Les sanitaires se trouvent au bout du couloir et les prisonnières doivent obtenir l’autorisation pour s’y rendre. »

Les périodes d’exercice sont également limitées. « Lorsque j’étais avec elles, nous étions autorisées à nous rendre dans une cour emmurée quatre jours par semaine pour 20 ou 30 minutes (…) Nous étions autorisées à prendre une douche et à laver nos vêtements à la main les trois autres jours de la semaine. »

Avant qu’elle les rejoigne, les deux prisonnières avaient chacune vécu une phase d’isolement, sans accès aux nouvelles extérieures ou à des livres, à l’exception du Coran et de quelques livres de prières musulmans.

« Lorsque j’étais avec Mahvash et Fariba, elles essayaient de garder une routine, lisant les livres autorisés en prison, regardant les nouvelles sur les chaînes étatiques, faisant de l’exercice sur place dans la cellule et priant. »

« Je crois qu’elles gardaient toujours à l’esprit le fait que leur comportement en prison pourrait avoir des conséquences pour la communauté bahá’íe dans son ensemble. Elles semblaient estimer qu’il s’agissait à la fois d’une responsabilité et aussi d’une bénédiction, ce qui leur donnait la force de continuer. »

Commentaires de Mlle Saberi, adaptés d’une interview pour One Country, la revue de la Communauté internationale bahá’íe, Volume 20, n° 3.

Pour plus d’informations sur la situation en Iran : http://www.bahai.fr/iran

Partager cet article :