COMMUNIQUÉ DE PRESSE : Des plans officiels récents en vue d’une intensification de l’oppression des bahá’ís en Iran sont révélés par la Fédération internationale pour les droits humains

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Paris, publié le 16 avril 2021 – La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et la Ligue pour la défense des droits de l’homme en Iran (LDDHI) tirent la sonnette d’alarme sur « l’intensification de la suppression des bahá’ís » en Iran en publiant conjointement le texte d’une Directive des autorités de la province du Mazandaran (Iran) qui a pour objet d’organiser la répression des bahá’ís de cette province en visant les principaux aspects de la vie économique, sociale et éducative des bahá’ís, et en mettant un accent particulier sur les élèves bahá’ís dans les écoles et collèges.

Le texte d'une Directive des autorités de la province du Mazandaran (Iran) qui a pour objet d'organiser la répression des bahá’ís de cette province.
Le texte d’une Directive des autorités de la province du Mazandaran (Iran) qui a pour objet d’organiser la répression des bahá’ís de cette province.

La révélation du contenu de ce document en anglais – et traduit en français : Directive du Gouvernorat de Sari du 21 septembre 2020 – daté du 21 septembre 2020 permet de mieux comprendre les confiscations définitives, survenues en octobre 2020, des terres des agriculteurs bahá’ís du village montagnard d’Ivel, situé dans la même province.[1] Ces expropriations faisaient suite à la destruction des maisons et bâtiments agricoles appartenant à ces agriculteurs bahá’ís qui constituaient jusqu’alors et depuis plus de 160 ans la moitié de la population de ce village. Le sort des bahá’ís d’Ivel a fait l’objet d’un article détaillé sur le site de Radio France internationale (RFI) et d’une dénonciation de très nombreux gouvernements, personnalités et organisations en février/mars 2021.

La Directive du 21 septembre 2020, dont l’initiative remonte au plus haut niveau du gouvernement, traduit la volonté des autorités iraniennes d’orchestrer la répression des bahá’ís au moyen d’un ciblage plus précis, secteur par secteur, cette fois à l’échelle de la province et de la ville. Elle laisse présager une intensification systématique des persécutions dans un avenir proche à moins d’une réaction internationale forte qui puisse faire fléchir les autorités iraniennes.

Pour Mme Hamdam Nadafi, responsable du Bureau des affaires extérieures des bahá’ís de France, « la Directive ne pourrait pas exposer plus clairement la volonté des autorités iraniennes d’extirper les bahá’ís d’Iran, en commençant par les plus jeunes. Faut-il rappeler que l’Iran, en tant que signataire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme (1948) et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966), s’est engagé à préserver sur son territoire la liberté de conscience ? Il est grand temps que l’Iran honore ses engagements internationaux que formule si bien l’article 18.2 du Pacte précité : ‘Nul ne subira de contrainte pouvant porter atteinte à sa liberté d’avoir ou d’adopter une religion ou une conviction de son choix.’ »

Mesures de répression exposées dans la Directive du 21 septembre 2020

La Directive a été rédigée par la « Commission sur les Ethnicités, sectes et religions » de la ville de Sari, capitale de la province du Mazandaran.  Cette Commission opère sous l’égide du Conseil suprême de la sécurité nationale, dirigé par le Président de l’Iran.

Lors de la réunion du 21 septembre 2020 de cette Commission, ont été conviés les représentants des plus importantes administrations provinciales, y compris la police, la sécurité, l’éducation, les universités, le commerce et l’industrie. Cette réunion avait pour objet de : « revoir le statut le plus récent de… la secte bahá’íe subversive. »

A la suite de la réunion, les mesures prises ont été affectées et ventilées entre les diverses administrations.

Ces mesures comprennent, entre autres :

  • le renforcement des contrôles par les organes de police et de sécurité des réunions publiques et privées et des sites des « ennemis »
  • l’accroissement du niveau d’alerte et de sensibilisation des directeurs et enseignants, des établissements scolaires et secondaires, « dans leur manière de gérer les élèves bahá’ís afin de les gagner à l’Islam » et « d’identifier les élèves bahá’ís »
  • en coordination avec les autorités de police et de sécurité, « entreprendre des mesures de dissuasion et de contrôle »
  • la poursuite de l’interdiction de l’accès des bahá’ís à l’enseignement universitaire
  • le « contrôle » des commerces tenus par des bahá’ís.

D’après le texte du compte-rendu : « Il a été décidé que les mouvements de la secte bahá’íe subversive (…) devront être rigoureusement contrôlés et qu’un plan détaillé doit être adopté en ce qui concerne les institutions culturelles et éducatives. »

Directive traduite en français du Gouvernorat de Sari du 21 septembre 2020

Une Directive qui suscite de vives inquiétudes

Karim Lahidji, président de la LDDHI et président honoraire de la FIDH, affirme que « ces mesures reflètent l’intensification par le gouvernement iranien de la persécution des adeptes de la foi bahá’íe. En contravention des obligations internationales contractées par l’Iran, les autorités les considèrent comme hérétiques, veulent bannir leur religion et estiment que la pratique de la foi bahá’íe constitue un acte subversif. »

Wolfgang Kaleck, Secrétaire général du Centre européen pour les droits constitutionnels et humains, a exprimé ainsi sa préoccupation à propos de cette Directive : « Ce nouveau document semble indiquer qu’au niveau provincial, au moins, des instructions de grande portée ont été données sur la manière de mettre en œuvre l’exclusion des bahá’ís de la vie publique. »

Selon Diane Ala’i, représentante de la Communauté internationale bahá’íe auprès des Nations-unies à Genève, « nous pouvons dire avec quasi-certitude que, bien que le document soit émis par une autorité locale, il émane des autorités gouvernementales nationales au plus niveau et cela laisse supposer que des réunions et directives semblables ont été faites sur l’ensemble du territoire iranien. »

Quelques points de repère

 Les bahá’ís d’Iran constituent la minorité religieuse non-musulmane la plus importante d’Iran. La persécution des bahá’ís depuis 42 ans a été largement documentée et condamnée par les Nations-unies.

Voir la plus récente condamnation, soutenue par la France. Plus de 200 bahá’ís ont été exécutés depuis la révolution islamique de 1979, et depuis les années 1980, les bahá’ís n’ont plus accès à l’enseignement supérieur, ne peuvent sans entrave exercer un métier ou une profession, sont complètement exclus de tout emploi dans l’administration et leurs cimetières ont été pillés ou détruits.

Documentation détaillée sur la situation : https://www.bahai.fr/actualites/

Contact : Bureau des affaires extérieures des bahá’ís de France – 45 rue Pergolèse – 75116 PARIS – 01 45 00 69 48

[1] Déjà, le 31 octobre 2016, dans cette même province du Mazandaran, une Commission comparable avait promulgué une ordonnance qui entraîna la mise sous scellés de 200 magasins tenus par des bahá’ís. Ces fermetures ont fait l’objet de recours par les bahá’ís auprès de diverses administrations et juridictions. En fin de cause, le 14 juillet 2018, l’Ayatollah Ahmad Jannati confirma l’avis du Conseil des gardiens de la constitution, selon lequel les confiscations « n’étaient pas contraires à la Shariah. »

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